Lors de notre événement la Rentrée du Digital Learning, nous avons choisi d’aborder une tendance de formation qui se développe depuis plusieurs années : le mentoring. Futur de la formation, le mentoring regroupe de nombreux avantages et permet de mettre en valeur les talents internes de l’entreprise. Victoria Pinto-Mesías, à l’origine du programme mis en place chez BlaBlaCar aux côtés d’Emilie Baliozian, nous en parle dans cette interview inédite.
Qui est Victoria Pinto-Mesías ? Peux-tu te présenter ?
VPM : “J’ai ce qu’on peut appeler un profil plutôt international. J’ai commencé par un Bachelor International dans une école hôtelière en Suisse. J’ai poursuivi mon parcours dans un Master International en Direction des Ressources Humaines en France. On m’a conseillé au vu de mon profil de me tourner vers les RH et j’y travaille maintenant depuis 2017. Après avoir touché à différentes fonctions, j’ai vraiment trouvé ma passion dans le Learning and Development (L&D) !
Pendant le covid, il était impossible pour moi de rester sans rien faire alors je m’y suis d’autant plus intéressée. J’ai fini par rejoindre BlaBlaCar il y a bientôt 2 ans où je suis Talent Development Analyst. J’accompagne environ 700 collaborateurs dans 7 pays différents : un challenge que j’adore !”
Comment est apparu le besoin de former vos collaborateurs par le mentoring ?
VPM : “Le mentoring comme le coaching sont des sujets qui me passionnent et que je valorise beaucoup. Notre programme de mentoring est devenu une priorité pour 3 raisons :
- Chez BlaBlaCar, les soft skills ont vraiment une place centrale. Même si nous sommes une entreprise de tech, nos résultats de 2021 ont démontré que 60% des formations complétées étaient des soft skills.
- Les bénéfices du mentoring sont apparus comme évidents car ils étaient en total alignement avec nos valeurs de “Share More, Learn More” et de “Fail, Learn, Succeed”. C’était donc une façon idéale de valoriser nos formations.
- Nous avons remarqué que beaucoup de nos talents étaient réputés en externe mais peu connus en interne. Le mentoring était alors une solution pour mettre en lumière leurs compétences et connaissances.”
Pourquoi avoir choisi d’accompagner spécifiquement les femmes dans l’univers de la tech ?
VPM : “Lorsque nous avons souhaité lancer le programme de mentoring, nous n’avions pas d’outil pour nous aider à déployer. Il a donc fallu faire des choix pour prioriser un segment. On s'est alors donné un objectif de représentativité des femmes dans la tech chez nos mentees.
Dans la tech, comme dans beaucoup d’autres secteurs d’ailleurs, il y a une proportion plus faible de femmes à haute responsabilité. Dans les équipes engineering le constat est encore plus flagrant ! Chez BlaBlaCar, nous avons des femmes très inspirantes dans ces équipes. Alors qui de mieux que nos propres talents leaders féminins pour élever et renforcer une communauté de femmes en interne ?”
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées dans la création de cette offre ?
VPM : “Comme je l’ai dit nous n’avions pas d’outil, ça a donc représenté une charge de travail importante. Ce qui devait nous prendre quelques semaines nous a pris des mois : présentation du programme au global, page sur notre intranet, visuels, photos des mentors, communications impactantes, réflexion sur le système d’inscription à choisir, création de sondages…
Nous avons dû restreindre le nombre de mentors et de mentees (mentorés) pour pouvoir gérer le projet sans les outils adaptés (qui étaient hors budget pour ce lancement).”
Comment s’organise votre offre de mentoring pour femmes ?
VPM : “Notre programme de mentoring s’appelle RISE, je l’ai co-créé avec Emilie Baliozian, Sustainability & Coms Manager. C’est un programme international dédié au développement des femmes chez BlaBlaCar, en priorité celles dans les équipes tech.
Pour commencer et cadrer ce lancement, on s’est focalisés sur la notion de leadership. On l’a identifié grâce à des rapports de performance sur lesquels on s’est rendu compte qu’il serait intéressant d’approfondir cette compétence, d’autant plus par le mentoring. Les critères pour sélectionner nos mentors se sont dessinés naturellement : toute personne s'identifiant comme femme, au dessus du level 5 (basé sur l'échelle de Radford, chez BlaBlaCar cela réfère aux niveaux supérieurs de l'entreprise) et qui a de l’expérience en tant que manager. La question de la diversité est aussi apparue comme un critère important pour nous.
D'ailleurs nos mentors ont elles-mêmes reçu une formation ou un coaching en leadership. Cette offre bénéficie même aux femmes déjà les plus expérimentées.”
Quel rôle joue le mentoring dans votre offre de formation globale ?
VPM : “Aujourd’hui le mentoring prône nos valeurs dans notre offre de formation et c’est quelque chose d’important pour nous. Il représente 3 objectifs principaux :
- Connecter : en créant un sentiment de communauté en interne
- Soutenir : en proposant un environnement sans jugement
- Apprendre : en développant les compétences des mentors et des mentorés”
Quels sont les résultats que vous avez pu observer jusqu’ici ?
VPM : “Nous avons eu de très bons retours avec une forte reconnaissance des mentors/mentees d’avoir travaillé sur ce programme. Nous avons pu accentuer la valorisation des talents en interne et renforcer la communauté BlaBlaCar (avec le distanciel, certaines personnes ne s’étaient jamais vues en 2 ans !).
On a eu beaucoup de demandes de volontaires pour devenir mentor et de nombreuses demandes pour être mentees. On pense souvent que le mentorat va demander trop d’investissement mais les collaborateurs se sentent valorisés et participent avec plaisir !”
Aurais-tu un conseil à partager aux entreprises qui souhaiteraient lancer un programme de mentoring sans beaucoup de moyens ?
VPM : “C’est un des formats les plus enrichissants. Mais si vous faites le choix de vous en occuper en totale autonomie, il est vraiment important de prévoir un grand temps de préparation. La première impression détermine beaucoup pour la suite.
On peut croire que c’est simple : on lance un mail et les mentors et les mentorés se débrouillent entre eux. Mais ce n’est pas le bon chemin à suivre, le mentoring représente beaucoup plus que ça. D’autant plus si vous souhaitez évaluer avec des KPIS les améliorations de performance ! Les mentors ont peur de devenir mentors et les mentees sont très impressionnés aussi. Il faut les accompagner et leur donner des clés : par exemple nous avons créé un guide RISE pour notre programme avec des instructions, des conseils, des modèles… Différents contenus pour définir ce qu’est le mentoring, donner du sens à leurs premiers échanges et surtout ne pas les laisser démarrer sur une page blanche. En complément, pour remercier nos mentors de leur implication et de leur disponibilité, elles ont chacune reçu un coaching personnalisé avec un expert coach (4 fois 1h) pour se préparer au mieux à cette position de mentor.
C’est vraiment une expérience intéressante, même en tant que RH ! Je ne peux dire qu’une chose : lancez-vous.”
Anecdote bonus
VPM : “Quand j’ai commencé mon benchmark d’outils et de plateformes de mentoring, j’ai échangé avec Pathline. Ils étaient bluffés car tout le travail que nous avons mené avec Emilie, ils en ont créé une start-up ! On est passé à côté d’un business (rires). Ils ont pris en compte certains de mes conseils pour leur dernière fonctionnalité; je pense qu’on travaillera sûrement avec leur outil à terme.”
🙌 Un immense merci à Victoria Pinto-Mesías pour nous avoir accordé son temps et partagé son expérience et ses conseils sur le programme de mentoring mis en place chez BlaBlaCar.